Accueil > Portrait d'artisan.e.s > Dans les yeux de Julia, tapissière à Belley

Julia, tapissière à Belley, a rejoint la ruche fabrikable au tout début de l’aventure ! Nous proposons son atelier tapisserie dans lequel vous apprenez à fabriquer un repose-pied tapissé et ses cours de tapisserie pour apprendre à rénover un fauteuil sur fabrikable ! Julia nous a accordé un moment d’échange pendant lequel nous avons pu lui poser des questions sur son parcours, son histoire et son métier. On vous partage cet échange, on espère que ça pourra vous apporter des réponses ou vous inspirer de nouvelles questions !

Présente toi en quelques mots, qui es-tu ?

Je suisJulia, tapissière d’ameublement à Belley, je suis passionnée par ce que je fais et plutôt créative !

Comment définirais-tu ton métier ?

Je dirais que c’est un métier ancestral, qui a des codes bien définis et en même temps, on a parfois besoin de sortir du cadre. C’est un métier où tu allies la créativité, la création et dans le même temps un savoir-faire auquel tu ne peux pas déroger !

D’après toi, quelles sont les forces de ton métier ?

Je pense que nous redevenons dans l’air du temps, où on ne jette plus, on rénove. Mais on rénove de façon personnalisé, on est là pour répondre à une attente particulière. Notre force réside aussi dans le fait que ce soit du qualitatif et qu’on est vraiment pas dans quelque chose que l’on va jeter au bout de 5 ans.

Quels sont les indispensables pour être tapissière ?

Dans mon cas, où j’ai ma propre boutique et je reçois les gens, c’est de savoir parler aux gens, être à leur écoute. Je pense que c’est même presque le plus important, parce que finalement la technique elle s’acquière tout au long de notre carrière mais le savoir-être, savoir parler et écouter c’est plus difficile à apprendre.

Depuis que tu as commencé ton métier, tu aurais des histoires insolites à nous raconter ?

Les gens, souvent les hommes, qui arrivent et qui me disent « non mais voyez il y a juste à faire comme ci comme ça, vous mettez trois clous et deux sangles ». Au début ça me mettait dans le doute parce que le métier de tapissier c’est un métier plutôt d’homme, mais maintenant je le prend plutôt sur le ton de l’humour, je les regarde droit dans les yeux et je leur dis « puisque vous avez l’air de parfaitement maitriser le métier pourquoi vous venez me voir ? » En général ça remet les choses à leur place !

Qu’est-ce que tu préfères dans ton métier ?

Je n’ai pas l’impression d’avoir quelques chose que je préfère, disons que c’est un ensemble parce que je suis un peu touche à tout. Ce métier me permet d’être dans le « touche à tout ». Je vais par moment, être dans la couture et j’aime, par moment je vais faire du fauteuil, de la mousse, du crin, et j’apprécie, par moment je vais être en contact avec les clients et ça j’adore, et pour autant je peux travailler seul. J’aime la palette entière en fait !

La pièce dont tu es la plus fière ?

Ça ne va pas forcément être les pièces les plus techniques. Je vais être très fière d’arriver au bout et de réussir mais j’aime surtout les pièces de création. Je suis très fière d’avoir imaginé la pièce et d’être aller au bout. C’est très difficile d’avoir des pièces préférées, à chaque fois que j’en ai une nouvelle dans mes mains, j’y met un petit peu de moi, et elle devient à chaque fois ma préférée !

Est-ce que c’est une fierté pour toi d’être artisane ?

Oui, oui, complètement ! Être artisan, pour moi ça a une valeur, une valeur éthique, qualitative, je le mets en avant, encore plus avec l’appellation Artisan d’Art. Oui je suis fière !

Est-ce que c’est difficile d’être artisan en 2022 ?

Je ne suis pas sûre que ce soit plus difficile qu’avant, je ne suis pas sûre que ce soit plus facile non plus. Ça reste du commercial, il faut qu’on en vive. Mais si on peut essayer d’en vivre en faisant quelque chose dans lequel on s’épanouit et dans lequel on est bien, c’est vachement mieux !

Comment imagines-tu ton métier dans 10 ans ? Penses-tu que la tapisserie et l’artisanat d’art en général va évoluer ?

Non je ne pense pas que ce soit quelque chose qui soit voué à être très évolutif. On est sur des choses très cadrées. Moi dans 10 ans, je me vois avoir touché à plein de choses, collaboré avec plein de personnes, faire plein d’autres choses. Je laisse plein de portes ouvertes, je ne suis absolument pas fermée !

Qu’est ce qui t’a donné envie de te lancer dans la tapisserie ?

J’aimais depuis toute petite créer, utiliser mes mains, travailler de mes mains. J’étais un peu touche à tout et dès petite, puis ado je faisais des points de croix, puis de la couture, et après du tricot, de la rénovation de meubles… J’ai vraiment touché à tout ! Et finalement, dans le métier de tapisserie, c’est vraiment ce que j’ai trouvé le plus global. J’avais ce contact avec le tissu, avec la matière, il y avait la notion de création, de beau et la notion de rénover. Je pense que c’est ça qui m’a attiré, cette globalité.

Quand as-tu su que tu voulais en faire ton métier ?

Ça a été assez tardif puisque c’était une reconversion. C’était après un bilan de compétence qui a duré 1 an et demi. Il a fallu le temps que ça murisse et après ce bilan j’ai compris que c’est ça que je voulais faire, je me suis dit « oui, c’est ça » !

Tu faisais quoi avant la tapisserie ?

J’étais infirmière, dans l’hospitalier, le libéral, santé au travail… je pense que j’ai besoin de bouger et de voir toutes les facettes de ce que je fais, que ce soit dans un métier ou un loisir !

Où est-ce que tu t’es formé pour la tapisserie ?

Après mon bilan de compétences je suis allé au lycée professionnel de Lamarque à Rilleux-la-Pape, où j’ai passé un CAP en 1 an, c’était une formation pour les adultes.

Qu’en as-tu pensé ?

C’est intense ! En peu de temps, on doit acquérir un maximum de compétences techniques, et des compétences en dessin, histoire de l’art… C’est intense mais c’est vachement intéressant !

Tu la conseilles ?

Oui je la conseille. En revanche c’est un peu illusoire d’imaginer que l’on va sortir et que l’on va tout savoir faire. À mon avis il faut se créer un réseau, créer des liens avec d’autre tapissier, d’autre corps de métier qui vont pouvoir nous aider. On ne peut pas être tout seul, on ne peut pas être artisan et être tout seul, sans réseau !

Est-ce que tu as eu des doutes ou des craintes au moment de te lancer ?

Des doutes, oui, je suis pleine de doutes. Même encore maintenant je ne vis pas une journée sans doutes, au niveau des mes choix, de ce que je fais, si je le fais bien. Mais je pense que j’ai un caractère qui me permet de foncer parce que quand je décide quelque chose j’y vais à fond Donc les doutes sont là, il y a des moments ils m’assaillent et m’envahissent et il y a des moments où je remonte et je me rassure, j’ai confiance, je me dis j’y vais et j’y vais !

Quand tu as voulu te lancer, tu as réussi à créer ce réseau ?

Oui, c’est marrant parce que je suis quelqu’un de plutôt réservé et j’ai réussi à me créer un réseau et très vite, de plein de personnes ! On s’aide mutuellement, ça s’est créé très vite et de façon très naturel parce que j’ai osé montré qui j’étais.

Tu es passé d’infirmière à tapissière, l’auto-entreprise c’est quelque chose qui t’intéressait déjà ? Tu connaissais ?

J’étais infirmière libérale, j’étais déjà à mon compte donc l’indépendance financière, la notion de travailler seule c’est quelque chose que je connaissais. La notion de vente s’est rajoutée par dessus et ce n’était peut-être pas le plus simple pour moi, notamment de se vendre. De toute façon je le savais quand je me suis formée, je ne pourrai pas être embauchée par un tapissier donc je savais qu’il fallait que je crée mon entreprise, je m’étais préparée !

Est-ce que le métier de tapissière aujourd’hui ça permet de bien vivre ?

Alors bien vivre, non ! Il faut être honnête, je n’arrive encore pas à sortir le SMIC. En revanche, j’y trouve un équilibre dans le sens où je suis dans quelque chose qui me plait, je gère mon temps comme je veux, et forcément il y a toujours cette notion d’argent qui plane, la question d’est-ce que je vais y arriver, est-ce que je vais finir mon année comme il faut, finir par être vraiment rentable… Moi j’y crois, mais on est aussi plein de freins quand c’est une reconversion, un métier de niche mais je suis persuadée de pouvoir y arriver !

Est-ce que c’est la formation ou la création/rénovation qui te rapporte le plus aujourd’hui ?

C’est plutôt le côté création / rénovation qui rapporte le plus. Les gens viennent pour mon travail ! Le côté de formation rapporte un peu de chiffre d’affaires mensuel qui va venir s’ajouter au reste mais si je regarde vraiment je ne suis pas sûre d’être hyper rentable. C’est pas grave parce que c’est un super moment, on passe des bonnes journées et moi qui travaille majoritairement seule, j’adore avoir du monde avec moi et j’adore transmettre !

Qu’est-ce que ce serait tes conseils aujourd’hui pour quelqu’un qui voudrait se lancer demain dans la tapisserie ?

D’une part, d’oser y aller, essayer de voir quels sont les freins qui t’empêchent d’avancer, travailler dessus. D’autre part, d’être rigoureux, réglo dans la technique, de faire quelque chose de propre. Le fait d’oser y aller va compenser la technique qui est parfois un peu défaillante quand on débute. Ne pas avoir peur des autres, on est ce qu’on est et ça se transmet dans ce que l’on fabrique !

Merci Julia !

Voilà vous savez tout, ou presque 😉

Si vous êtes plutôt format vidéo, voici la version filmée de cette interview avec Julia !

Ghislain, fondateur de fabrikable 🔨

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